NOTE : Les entrées en traductologie font partie de la base de données bibliographiques. Pour y avoir accès, aller à « Faire une recherche dans notre base de données ».
La traductologie dans le projet de bibliographie
La section Traductologie du projet de bibliographie offre de l'information bibliographique sur les publications dans le domaine de la traductologie littéraire canadienne. Ce domaine jouant un rôle de plus en plus important dans les paysages universitaires et littéraires canadiens et internationaux, cette section de la base de données électronique bibliographique se veut un outil de recherche de grande valeur.
Cette section a été créée par Pamela Grant et Kathy Mezei, qui se sont jointes à l'équipe en 1998 et 2001 respectivement, ainsi que par plusieurs assistants de recherche dont Natasha Dagenais, Stefania Forlini, Alessandra Capperdoni, Pierrette Richard, Simon Gilbert et Eva Milanovic. Kathy Mezei avait préalablement publié une bibliographie commentée, Bibliographie de la critique des traductions littéraires anglaises et françaises au Canada / Bibliography of Criticism of English and French Literary Translations in Canada (Cahiers de traductologie no 7, Ottawa : Presses de l'Université d'Ottawa, 1988). Des arrangements avaient alors été pris avec l'éditeur afin que les entrées de cette bibliographie soient incluses dans la base de données électronique du projet. Les membres de l'équipe ont aussi commencé à mettre à jour les entrées en traductologie ayant trait à la littérature canadienne à partir de 1988.
Depuis 2005, deux nouveaux membres font partie de cette équipe de traductologues et y apportent leur propre expertise : Patricia Godbout, professeure à l'Université de Sherbrooke, est spécialiste de la traduction littéraire au Québec au vingtième siècle, et Hugh Hazelton, professeur à l'Université Concordia à Montréal, est spécialiste de la littérature latino-américaine ainsi que de la traduction du et vers l'espagnol et le portugais.
Les entrées publiées dans la bibliographie de Kathy Mezei sont centrées sur la critique d'œuvres littéraires canadiennes traduites de l'anglais vers le français et du français vers l'anglais jusqu'en 1986. Nous avons élargi les paramètres pour cette base de données électronique afin d'inclure les écrits jusqu'au présent sur la traduction d'œuvres littéraires canadiennes vers le français, l'anglais et d'autres langues, sur la traduction littéraire en langues de départ et d'arrivée et sur la traduction littéraire par des traducteurs et des traductrices canadiens lorsque le contexte canadien ou culturel joue un rôle significatif (par exemple, la traduction de Macbeth en joual par Michel Garneau). La base de données inclut également les études des traductions de littératures et de langues mineures au Canada, qui possèdent un corpus de traduction important. De même, on y trouve les études théoriques qui traitent de traduction littéraire et d'œuvres par des théoriciens et des théoriciennes canadiens en traduction littéraire et qui traitent de traduction littéraire canadienne en partie ou comme sujet principal. Les traductions ne font pas partie de la bibliographie, mais celle-ci comprend les préfaces, les introductions et les avant-propos les plus significatifs.
Contexte de la traduction littéraire au Canada
Les premiers écrits sur la traduction et l'interprétation au Canada relatent des débuts violents et coercitifs : en 1534, Jacques Cartier captura deux Iroquois, les embarqua vers la France et les utilisa ensuite comme interprètes lors de son voyage subséquent en Nouvelle-France (Jean Delisle, La Traduction au Canada / Translation in Canada 1534 - 1984). Ainsi, dès ses débuts, la traduction a porté les marques de l'appropriation culturelle et de l'exploitation coloniale. Depuis que le français et l'anglais ont obtenu le statut de langues officielles dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 et depuis la Loi sur les langues officielles du gouvernement fédéral en 1969, la traduction est profondément ancrée dans les contingences politiques.
La croissance de la traduction littéraire au Canada est plus récente. Dans la deuxième partie du vingtième siècle, alors que la production littéraire canadienne anglaise et québécoise augmente et se diversifie, il y a un intérêt accru dans sa traduction. Dans les années soixante et soixante-dix, alors que le Québec fait face à un profond mécontentement et à des peurs au sujet de sa survie culturelle et linguistique, la traduction littéraire, particulièrement du français vers l'anglais, prospère. Depuis, elle a grandi et joue un rôle constant, quoique sobre, dans la vie culturelle canadienne. Au cours des dernières années, on remarque que le nombre de traductions de l'anglais vers le français dépasse sa contrepartie du français vers l'anglais.
Le programme de subventions à la traduction du Conseil des Arts du Canada a été créé en 1971 et, en 1975, l'Association des traducteurs et traductrices littéraires du Canada a été créée pour faire la promotion de la traduction littéraire et pour offrir un soutien aux traducteurs et aux traductrices littéraires. La traduction littéraire a été incluse dans les prix littéraires du Gouverneur général en 1987. Les autres jalons qui ont contribué à légitimer la traduction littéraire au Canada ont été la fondation des magazines tels Ellipse (1969), Meta (1966) et TTR (1987); la publication de la monographie de Philip Stratford en 1977 Bibliography of Canadian Books in Translation: French to English and English to French; l'inclusion de la section « Traduction » dans le University of Toronto Quarterly's Letters in Canada, à partir de 1977; la publication de traductions littéraires par des petites maisons de publication (telles que Exile, Harvest House, la « Collection des deux solitudes » par Pierre Tisseyre, Oberon, Anansi, Véhicule, Guernica, Coach House Press, Talonbooks, XYZ, Boréal, Leméac, Cormorant) ainsi que le début des programmes en traduction dans différentes universités (telles l'Université d'Ottawa, Concordia, Glendon College, Laval, l'Université de Montréal et l'Université de Sherbrooke).
La réalité politique du biculturalisme et du bilinguisme a été représentée de différentes manières par les auteurs, les traducteurs et les critiques. En premier, elle a été représentée comme une opposition binaire - « le lien de la réalité binaire » (E.D. Blodgett, Configurations, p.25)-par le biais de métaphores telles que les deux solitudes, la double hélice, les doubles escaliers au Château de Chambord, l'ellipse[1] et par le biais des concepts d'altérité et de diglossie; ensuite par des images de mixité telles le métissage, l'hybridité, la fusion; et, finalement, par une opposition binaire plus fluide, avec moins d'opposition par le biais de conversations, de dialogues et de coopération. Il n'est pas surprenant de constater que le spectre de la mondialisation de l'anglais module les conversations contemporaines sur la traduction et le statut de la littérature et de la langue québécoises.
On constate de plus un intérêt croissant envers la traduction littéraire canadienne et sa pratique. Alors que la traduction au Canada a traditionnellement été binaire et interne - centrée sur les écrits en anglais et en français par des auteurs et des auteures canadiens et québécois - les récentes années ont vu s'élargir le champ de pratique et d'études de la traduction canadienne pour englober les autres langues et les autres cultures.
L'influence internationale de la traduction littéraire canadienne
Des traductrices et des traducteurs, des chercheuses et des chercheurs internationaux ont fait remarquer l'importance de l'école canadienne en traduction par son contexte politique et culturel particulier et ils ont observé le rôle important joué par les écrivaines et traductrices féministes canadiennes dans l'émergence de la théorie des genres et de la traduction. Par exemple, Edwin Gentzler a reconnu en 1993 dans Contemporary Translation Theories l'importance des traductrices féministes : « la question complexe de l'identité canadienne - les problématiques de colonialisme, de bilinguisme, de nationalisme, d'héritage culturel, du système littéraire faible et les questions de genre - semblent offrir une plateforme intéressante à partir de laquelle il est possible de poser les questions sur la théorie moderne de la traduction » (184). Susan Bassnet fait également référence à une école canadienne qui conceptualise la traduction comme une activité politique. En comparant les théoriciens brésiliens et canadiens, Bassnet observe que les deux groupes « se préoccupent de trouver une pratique et une terminologie de la traduction qui fera comprendre la rupture avec la prédominance de l'héritage européen au moment même de sa transmission (Comparative Literature, 157). Jeremy Munday, dans la section « Translation and Gender » de son livre Introducing Translation Studies: Theories and Applications, récemment publié, porte son attention sur les écrits de Sherry Simon, Barbara Godard et Susanne de Lotbinière-Harwood. L'influence et l'importation des théories et des expériences internationales sur la traduction sont reflétées par E.D. Blodgett dans son modèle de traduction littéraire canadienne basée sur la théorie des polysystèmes. Elles sont également reflétées par Sherry Simon et Paul St-Pierre dans leur extension de la terminologie [canadienne] de traduction et l'exploration du statut de la traduction des littératures mineures à partir de leur rencontre avec le multilinguisme en Inde (2000).
[1]: Le concept des deux solitudes fait bien sûr référence au roman de Hugh MacLennan paru en 1945. Ce concept est devenu un lieu commun, une métaphore surutilisée pour faire référence à notre état biculturel et bilingue, prenant ironiquement une signification différente de l'image positive de Rainer Maria Rilke dans la citation qui sert d'épigraphe au roman : « L'amour, c'est deux solitudes qui se protègent, qui s'éprouvent et s'accueillent l'une l'autre. » (trad. Louise Gareau Desbois) Dans All the Polarities, Philip Stratford a adopté la double hélice, une formation spirale parallèle, afin de décrire les deux littératures. L'escalier en double spirale au Château de Chambord, que deux personnes peuvent monter sans se rencontrer, était l'image utilisée par Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, le premier des premiers ministres du Québec élus après la Confédération, pour décrire les deux cultures (Stratford 1986, 3). L'ellipse fait référence à une sphère géométrique avec deux centres et offre le logo du journal sur la traduction, Ellipse.